Auditorium Radio France
le 12 avril 2019
Henri Dutilleux : L’Arbre des Songes, concerto pour violon et orchestre
Anton Bruckner : Symphonie n°6 en la majeur
Leonidas Kavakos, violon
Orchestre Philharmonique de Radio France
Myung-Whun Chung direction
Salle comble, pour Dutilleux ou pour Bruckner ? Le public n’a pas tranché ; même si il a applaudi à tout rompre la symphonie de Bruckner, c’est plutôt à l’orchestre qu’allaient ses bravos. Il appréciait le Philhar en grande forme avec ses trompettes et cors rutilants, heureux de pétarader dans ce machin austro-quelque chose, qu’on appelle symphonie. On parle de cette musique réservée aux oreilles germaniques, anglo-saxonnes, dommage qu’elle ne soit pas restée dans le Nord et qu’elle envahisse nos salles de concerts. Bon on va se faire des ennemis. Mais je donnerais une mesure de Berlioz pour une symphonie de ce soi-disant plus grand symphoniste de l’histoire de la musique ! Les Français ont toujours fait des complexes face aux musiques germaniques, hé bien nos compositeurs français, et loin de moi tout chauvinisme, sont souvent plus créatifs. Merci monsieur Karajan de nous avoir imposé Bruckner ! Aujourd’hui cela continue avec Rihm ! Bon tout n’est pas à mettre dans la corbeille, son Requiem, œuvre de jeunesse est très émouvant ainsi que son Te Deum et quelques oeuvres pour orgue ; allez on aime bien la neuvième aussi où jamais le brave Anton n’arrive à l’extase ! Chez Bruckner, ça monte, ça monte, mais ça ne fait jamais comme dans la fameuse pub Perrier où la bouteille éjacule son breuvage pétillant tout en disant « C’est fou » ! Le Philhar avec Myung-Whum Chung à la baguette et sans partoche c’était fou !
C’est plutôt L’Arbre des songes, le concerto pour violon de Dutilleux qui nous laissa pantois. Leonidas Kavakos est vraiment le meilleur violoniste pour cette œuvre, ce chef-d’œuvre pour violon. Il a eu la chance de rencontrer le Maître. D’une complexité intelligente ce concerto est un bonheur à écouter et à voir interpréter. Dutilleux dans cette maison est chez lui et l’Orchestre Philharmonique le lui rend bien. Myung-Whum Chung qui a dirigé cette formation pendant quinze ans le connaît bien et c’était un grand plaisir de voir cette entente entre lui, les musiciens et le violoniste. Ce concerto fut créé, avec succès, le 5 novembre 1985 par son dédicataire Isaac Stern et l’ONF dirigé par Lorin Maazel. L’œuvre est jouée d’un seul tenant, les quatre parties sont enchaînées et reliées par de brefs interludes. On connaît la lenteur pour écrire de cet immense compositeur, rien n’est laissé au hasard, c’est du point de croix. Légèreté, profondeur, richesse, poésie, complexité tout doit être mis en place pour que cette œuvre sonne juste et c’est ce que nous avons entendu ce vendredi à l’Auditorium. Le public ne s’y est pas trompé et a fait réellement un triomphe à Kavakos, au Philhar et à Myung-Whum Chung ! A l’entracte j’aurais dû quitter la maison et rester à l’ombre de cet arbre et songer à Henri Dutilleux .
©DR