19 bis Rue Saint-Louis en l’Île 75004 Paris
Dimanche 17 novembre 2024, 20h30
Dans cette magnifique église baroque, deux Te Deum ont empli les voûtes de ce monument ; celui très connus de Marc-Antoine Charpentier (1692) et un d’Élisabeth Jacquet de la Guerre (1721). Si celui de Charpentier nous ne sommes pas certain de la finalité de sa composition, celui de Jacquet de la Guerre, lui, a été exécuté pour la convalescence de Louis XV.
Cette compositrice, aujourd’hui beaucoup plus interprétée que naguère a eu une vie étonnante. Elle est née le 17 mars 1665 dans la paroisse de Saint-Louis-en-l’Isle de Paris (eh oui) et décédée le 27 juin 1729 à Paris. Elle est la plus célèbre compositrice sous Louis XIV et Louis XV ! À cinq ans elle joua du clavecin devant le roi soleil qui l’apprécia énormément. Elle est la première femme compositrice d’Opéra et faisait l’admiration de tous en son temps. Elle n’a jamais quitté l’île Saint-Louis (elle habita rue Guillaume Budé puis rue Le Regrattier). La partition de son dernier ouvrage, ce Te Deum, a disparu.
Grâce au talent de Georges Guillard, organiste entre autres de cette église, comme le père d’Élisabeth, et spécialiste de musiques anciennes, à partir d’extraits de compositions de la dame, a reconstitué un Te Deum. Ce dimanche, du haut de ses 85 ans, Guillard a dirigé le chœur, l’orchestre Camerata Saint-Louis de Paris, ainsi que de superbes solistes – Marie-Cécile Brossard-Henry, Sophie Pattey, sopranos, Bertrand Dazin, contre-ténor, Benoît Porcherot, taille, Jérôme Savelon, Jean-François Gay, Bertrand Bontoux, basses -. Il y eu des grands moments ; ainsi un extrait de la Sonata Quarta, un duo de basses avec basse continu, un Miserere d’après Jephté avec un duo de sopranos, deux flûtes et basse continu (Pierre-Alain Janin, Mariko Ninomiya, flûtes à bec) et le prélude et le final d’après Céphale et Procis avec le chœur, l’orchestre et les solistes. Il faudrait citer les 10 extraits d’œuvres qui composent ce Te Deum . Georges Guillard connait très bien cette compositrice et vient d’écrire un roman sur cette claveciniste prodige dont la renommée a marqué le temps de Louis XIV au même titre que Lully, Lalande, Campra ou Marais ( Journal d’Élisabeth Jacquet de la Guerre (1665-1729) CoolLibri, 286 pages). À l’époque l’île se nommée Notre-Dame puis devint l’île Saint-Louis.
On connait le Te Deum de Marc-Antoine Charpentier mais si vous ne l’avez jamais entendu en direct dans une église, vous ne le connaissez pas vraiment ! Quand les trompettes ( Joël Lahens, Antoine Azuelos et les timbales (Laurent Sauron) entonnent avec le chœur et l’orchestre le premier motet, là on se dit que Dieu existe ! Et que dire du final ! Les solistes sont ceux qui ont chanté la composition d’Élisabeth. La fougue, l’énergie, la précision, qu’a apporté la direction de Léonard Ganvert – qui n’est pas un chef d’orchestre baroque – a cloué sur place les auditeurs ( l’église était pleine). On était littéralement transporté ! Eh oui il y a des moments de musique formidables ailleurs que dans les lieux officiels où souvent cela ronronne pas mal ! Par exemple ce soir ce 21 novembre, c’est à l’Oratoire du Louvre à 20h30 qu’il faut aller. Philippe Maillard propose un requiem baroque allemand avec l’ensemble Vox Luminis et Lionel Meunier. Et le 25 il fait entendre l’étonnant Zachary Wilder au Musée Grévin dans du Purcell, Haendel, Pepusch, Eccles..