Samedi 16 mars 2019 : « De 2001 : Odyssée de l’espace à The Shining ».
Dimanche 17 mars 2019 : « Barry Lyndon Tribute ».
Après Nino Rota et ses musiques originales composées pour des réalisateurs, c’est un très grand metteur en image qui était à l’honneur ce week-end à l’Auditorium de Radio France avec l’Orchestre Philharmonique. Pour « Spartacus » Kubrick avait fait composer une musique exceptionnelle par Alex North. Pour monter « 2001 l’Odyssée de l’Espace » il s’est servi de musiques du répertoire classique et a refusé celles composées par Alex North qui ne s’en est pas remis. C’est souvent le cas chez les réalisateurs habitués à entendre les musiques temporaires choisies pour aider à faire le montage et leurs effets pervers. Avec mauvaise foi il s’en est expliqué, rien de mieux que la musique classique et les compositeurs de musiques de films ne sont pas à la hauteur de la musique du répertoire! Cela ne l’a pas empêché de changer d’idée pour les films suivants. Luchino Visconti avec l’Adagio de la cinquième de Mahler dans « Mourir à Venise », Oliver Stone avec l’Adagio de Barber pour « Platoon », Orson Welles et le soi-disant adagio d’Albinoni pour « Le Procès »…ont fait le succès de ces œuvres auprès du grand public. De nombreux spectateurs comme moi-même avons découvert Ligeti grâce à « 2001 » !
Le Chœur de Radio France sous la direction de Zoltán Pad a interprété Lux Aeterna mis en éclairage sur le plateau – une très belle idée qu’on devrait faire plus souvent pour les concerts – a donné le frisson à tous les auditeurs de l’auditorium. La soirée avait commencé par Atmosphères du même Ligeti. Cette œuvre faisait l’ouverture du film, dans le noir, une première, puis a été reprise dans la dernière séquence lorsque l’astronaute David Bowman traverse la porte du temps. Son exécution a démontré l’excellence des musiciens du Philharmonique. Ils seront tour à tour, pour certains, en soliste, dans le concert sur « Barry Lyndon ». Après avoir joué le concerto pour piano n°3 de Bartók, Bertrand Chamayou a eu l’heureuse idée, en bis, d’interpréter avec force un extrait de Musica Ricercate II entendu dans « Eyes Wide Shut ». Ligeti aurait dit qu’il a écrit ce morceau « comme un coup de poignard dans le cœur de Staline ! ». C’est avec Musique pour cordes, célesta et percussions de Bartók, dont on entend un extrait dans « The Shining », dirigé avec fougue et rigueur par Alan Gilbert que le concert de samedi s’est terminé dans l’euphorie générale.
Le lendemain, grâce à un éclairage très discret, à la « Barry Lyndon », l’ambiance donnait au concert un ton plus feutré, très à fleur de peau. La marche de Purcell écrite pour les funérailles de la Reine Mary, avec deux vents, bois et tambour éclairés à contre jour nous mettait dans l’atmosphère du film. Jean Rondeau, Violaine Cochard au clavecin, Ana Millet au violon, Renaud Guieu au violoncelle, Catherine Cournot au piano et les musiciens du Philharmonique ont replongé les spectateurs dans ce drame qu’est « Barry Lyndon ».
On prit beaucoup de plaisir à réentendre les tubes Sarabande de la suite n°11 pour clavecin de Haendel et le deuxième mouvement du Trio pour piano, violon, violoncelle de Schubert qui servent de leitmotiv tout au long du film. Le premier, est joué dès le générique, au duel et à la mort du fils de Barry ; l’autre, soutient la séduction de Lady Lyndon par Barry, leur mariage et la mélancolie de la Lady. Après le Concerto pour deux clavecins de J.S. Bach, une belle interprétation, le concert se termina avec le Concerto pour violoncelle en do majeur de Haydn, joué et dirigé avec panache et vivacité par Nicolas Alstaedt et un orchestre réduit du Philharmonique. Le violoncelle baroque de Alstaedt se mélangea aux instruments modernes du Philhar ! La salle était bondée par un public jeune, enthousiaste, un public qui n’a pas l’habitude de venir aux concerts classiques.
On souhaite que ce genre de manifestation se produise plus souvent. Avoir éclairé le plateau, mettre en scène par des lumières, quelle remarquable idée qui, on espère, ne sera pas que passagère ; par contre mettre en pingouin les musiciens pour jouer le répertoire contemporain alors que les instrumentistes, plus libérées ( ?), viennent soit en pantalons, soit en robe et talons hauts, que les chefs d’orchestre se présentent en chemise, que les solistes en décontracté, est une vraie hérésie aujourd’hui ! Ils en deviennent au XXIème siècle avec leur nœud pap’ et leur queue de pie, ridicules, les pauvres ! Une petite fausse note pour ces deux concerts enthousiasmants !