Auditorium d’Orsay
Franz Liszt
Angélus ! Prière aux anges gardiens, LW A283, n°1
Klavierstücke en fa dièse majeur, LW A233, n°3
Valse oubliée, LW A311, n°1
Nuages gris, LW A305
Henri Dutilleux
D’ombre et de silence
Sur le même accord
Le jeu des contraires
Alexandre Scriabine
Deux danses pour piano, op. 73
Vers la flamme, op. 72
Sonate pour piano « Messe noire », op. 68, n°9
Jonas Vitaud, piano
21 mars 2017
Dans la même thématique, La Nuit, le Cosmos , à l’Auditorium d’Orsay, Jonas Vitaud proposait des oeuvres de Liszt, Dutilleux et Scriabine. A première vue, on a pu penser que, comme organisé dans le cadre des Concerts Lunchtime, on avait droit à un récital glouton. Car ce pianiste talentueux a avalé d’un trait, un extrait des Années de Pèlerinage de Liszt, un bout des Trois Préludes pour piano de Dutilleux, puis, sans prendre son souffle, le Klavierstück en fa dièse majeur du même Liszt, et sans prendre le temps de nous laisser digérer, 3’30 d’extraits des Trois préludes, de nouveau de Dutilleux. Ensuite, il avala la Valse Oubliée et Nuages Gris de Liszt. Là, il a fait une pause en coulisse, peut-être pour boire un coup ? Puis Jonas Vitaud est revenu et a pris tout son temps pour interpréter Deux danses pour piano op.73 et la Sonate Messe Noire op.68 n° 9 de Scriabine. Là, pour chaque œuvre, il a joué du silence. Etait–il dans sa phase poste prandiale ? La réponse à cette manière d’engloutir les compositions sans que l’auditeur ne sache si c’était du Liszt ou du Dutilleux, on l’a eue dans l’interview que le pianiste a accordée à Arnaud Merlin sur France Musique (Interview qui est dans le disque). On y apprend que, pour lui, Liszt et Dutilleux sont deux figures résonnantes, l’un est solaire, l’autre de la nuit. Que les œuvres choisies sont de la fin de la vie de Liszt, très posées, et que ces deux compositeurs ont une trajectoire mystique et métaphysique importante car ils avaient l’un et l’autre le même besoin de religion. Dans la construction des morceaux choisis, Vitaud voit des analogies… Alors pour le récital, il s’est concocté une petit zapping, très à la mode aujourd’hui, avec ces extraits qu’il a enquillée, de manière brillante, les uns après les autres. Sans aucune explication. Le public, qui n’est pas au fait de ces correspondances, pensait écouter du Dutilleux alors qu’on était déjà dans du Liszt! Á force de croire que le public est très averti de la chose musicale, on le perd. Avant de jouer, demandons-nous qui est notre public ! Soyons aussi moins prétentieux ! Heureusement que les morceaux de Dutilleux étaient courts, disait mon voisin, car visiblement il n’aimait pas cette musique. Dommage ! Mais peut-être était-ce du Liszt car ces extraits sonnaient extrêmement modernes. A part cela, Jonas Vitaud a une belle technique et son disque vaut vraiment la peine qu’on l‘écoute. Les silences entre les morceaux (ce sont ceux qu’on a entendus pendant le récital) sont ici de vrais silences. La sonate opus N°1 d’Henri Dutilleux est de très belle facture.