Les Impatientes
Un roman de Djaïli Amadou Amal
Edition Emmanuelle Collas 240 pages
Sortie septembre 2020
Prix Orange du livre Afrique 2019. Sélectionné pour les prix Goncourt 2020
Née au Cameroun, Djaïli Amadou Amal est une écrivaine qu’on ne présente plus, une sorte d’icône féministe au départ de la littérature africaine , et mondiale aujourd’hui. Elle a été mariée à 17 ans et a connu les difficultés de la vie des femmes au Sahel. Son troisième livre était déjà sortie en 2017 et cette année comme elle a signé avec la maison d’édition Emmanuelle Collas son livre est ressortie sous un nouveau titre. C’est l’histoire de trois femmes qui racontent leurs expériences et leur destin brisé à cause d’une religion qui sert for bien les hommes et les détruit, elles, les femmes! Chacun a la vision de son propre Coran. Il est facile de le mettre à toutes les sauces. Soyez pour lui une esclave, Soyez pour lui un lit, bref, le Paradis pour une femme se trouve aux pieds de son époux ! C’est dans le Coran paraît-il ? J’avoue n’avoir pas eu la même version à sa lecture, même s’il y a des sourates assez violentes par rapport à la gente féminine. En voilà de beaux préceptes qui depuis la nuit des temps sont appliqués dans certaines régions où la religion musulmane est force de loi ! L’écrivaine avec une écriture simple, comme dans un récit documentaire, raconte l’histoire de la très jeune Ramla amoureuse d’un étudiant, qui veut devenir pharmacienne et qui devra épouser un vieux sur décision familiale, sa sœur, la jeune Hindou, elle devra épouser leur cousin Moubarak. Le jour de ses noces elle sera violée, battue, par son mari bigame qui marche au viagra ; Safira, plus âgée, se retournera contre la nouvelle femme de son mari Alhadji Issa qui n’est autre que Ramla! C’est un cercle infernal que raconte Les Impatientes. A toutes les trois, leur entourage féminin n’aura qu’un seul et même conseil : Munyal ! Patience ! Mais il lui fera subir les pires tourments et pire qu’un homme ! On n’est pas dans des milieux pauvres, incultes, non cela se passe dans des milieux aisés où l’argent n’est pas un problème. Avec de nombreux détails – ces histoires sont vraies – sur les relations hommes-femmes, les liens familiaux, Djaïli Amadou Amal montre comment les femmes devenues plus âgées participent à ses règles iniques et sont devenues garantes de la tradition machiste sous couvert de religion. Pourtant au début de leur vie, elles ont elles aussi subi tous les même travers de leur mari (mariage forcé, violence conjugale, viol, polygamie..).
©DR
Djaïli Amadou Amal contrairement à ce que dit la quatrième couverture, ne dénonce pas, elle raconte froidement les faits. On est dans le factuel et en cela son livre est plus terrifiant. La femme en définitive est celle qui perpétue la tradition, ne trouvant à dire comme justification que ce mot terrible : Munyal : patience ! Oui ce livre est passionnant parce qu’il lève le voile sur tout un pan d’une humanité sous le joug d’une façon de vivre, d’appliquer une religion. Voit-on en Occident qu’à coté de nos petits problèmes de statuts, il y a des millions de femmes qui sont traitées comme des esclaves ? Il est vrai qu’il est plus facile de manifester dans des pays démocratiques que dans ces pays, qui sous couvert eux aussi de démocratie, ont des coutumes fascistes. Il y a une chose amusante dans le comportement des femmes et que l’on retrouve dans toute l’Afrique, même s’il y a une religion importée (chrétienne, musulmane…) le rapport aux esprits, aux griots, sont toujours aussi vivace. Voilà sûrement un livre d’utilité publique mais à qui s’adresse-t-il ? Hélas pas à celles qui souffrent. Heureusement qu’il y a quelques Djaïli Amadou Amal de par le monde qui impatientes veulent faire changer leur mentalité. Est-ce le meilleur moyen ? Je n’en n’ai pas la moindre idée, et c’est un goût amer qui reste dans la bouche en refermant ce livre.