Edition Le Mot Et Le Reste, 2023, 460 pages
Maddalena Casulana, Antonia Bembo, Isabella Leonarda, Chiara Magarita Cozzolani, Wilhelmine von Bayreuth, Mariana Von Martines, sont des noms que l’on découvre à peine aujourd’hui, on commence à les jouer, les enregistrer. Mais combien de partitions ont disparu ? Il fallait bien que quelqu’un se mette à la tâche après tous les mouvements féministes actuels pour offrir à notre curiosité un dictionnaire sur ces femmes qui ont composé contre vent et marée de la musique dite savante et qui ont sombré pour la plupart dans les poubelles de l’histoire. Ce livre étonnant commence par une longue introduction, très intéressante, sur la problématique de la composition de la musique par la gente féminine : le soi-disant problème biologique, la théorie du sexe le la musique – le do majeur est masculin, gay et guerrier, le mi mineur est efféminé, amoureux plaintif dixit Marc-Antoine Charpentier ou Rameau etc etc, l’importance de la religion et sa domination pour évincer toutes les femmes des chœurs des églises, des offices religieux, leurs actions musicales discrètes au sein des couvents qui furent totalement rejetées par le Concile de Trente (1545-1563) ; des compositrices ont pu exister dans les cours et les palais, leur position sociale jouant en leur faveur, mais la musicologie patriarcale les a totalement évincées. Guillaume Kosmicki, musicologue, journaliste musical, spécialiste de la musique contemporaine a découpé son ouvrage en huit parties qui suivent volontairement les sections utilisées dans l’histoire de la musique savante occidentale : Antiquité, Moyen Âge, Renaissance, Siècle des absolutismes (musique baroque), Siècle des lumières (classique), XIXème siècle (musique romantique et post romantique), Périodes moderne et contemporaine. Chacune est introduite par un chapitre qui précise les généralités de la période, les grands changements sociaux politiques déterminant l’élaboration de nouvelles conceptions de la musique, de nouvelles esthétiques et de nouvelles formes. Ces descriptions sont toujours bien sûr orientées du côté de la création féminine et illustrées uniquement par des exemples de destins et d’œuvres de compositrices. Ce sont soixante neuf créatrices particulièrement représentatrices qui bénéficient d’une mini biographie et d’un éclairage sur quelques œuvres. Bien évidemment les périodes de l’Antiquité, du Moyen Âge, de la Renaissance sont rares. L’auteur a choisi sciemment ce découpage qui peut paraître un peu généraliste ou arbitraire mais il permet de ne pas nous perdre. Il s’est inspiré de sources importantes de la littérature adéquat ( travaux musicologiques, biographies, enquêtes, sur des compositrices, sur les femmes…des émissions de radio, sur internet, ). C’est un ouvrage qui fera sûrement date de part son sérieux et sa densité. Toutes personnes qui s’intéressent à la musique savante et à la présence des compositrices dans ce domaine se doit de posséder ce livre. Un ouvrage passionnant et essentiel.