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« L’ÉVÉNEMENT» : POUR QUI ?

L’ÉVÉNEMENT

un film d’Audrey Diwan avec Anamaria Vartolomei, Kacey Mottet Klein, Luàna Bajrami

L’HISTOIRE

France, 1963. Anne, étudiante prometteuse, tombe enceinte. Elle décide d’avorter, prête à tout pour disposer de son corps et de son avenir. Elle s’engage seule dans une course contre la montre, bravant la loi. Les examens approchent, son ventre s’arrondit.

L’AVIS

« Que la forme sous laquelle j’ai vécu cette expérience de l’avortement – la clandestinité – relève d’une histoire révolue ne me semble pas un motif valable pour la laisser enfouie. »  C’est un extrait du roman éponyme d’Annie Ernaux paru en 2000. Le film d’Audrey Diwan a remporté le Lion d’Or à la 78ème de la Mostra de Venise. C’est un film très français dans sa forme, avec cette qualité typique, NF des années 80. Il tient surtout sur la qualité du jeu de l’actrice Anamaria Vartolomei qu’on avait eu le plaisir d’apprécier dans le beau film de Marc Dugain L’Échange des Princesses. La musique des frères Galperine est a signalée. En lisant le livre, dont les qualités littéraires d’Annie Ernaux ne sont plus à prouver, on peut comprendre lorsque l’on est une jeune réalisatrice ( ?) d’être séduite par le sujet, l’écriture, et vouloir transcrire en image ce que raconte cette dame d’un âge certain. Transcrire est bien le terme. Le cinéma c’est autre chose. La question qui se pose à l’inverse de la littérature, pour qui a été fait ce film ? La génération des avant la pilule qui ont connu ce genre de situation, bien sûr va aller le voir et se souvenir de leurs angoisses. Ceux qui sont contre l’avortement n’iront sûrement pas le voir. Á l’époque, cette population, celle catholique intégriste, bourgeoise, faisait prendre le car à leur fille qui avait fauté, pour aller discrètement en Angleterre ou en Espagne et régler le problème loin de leur conviction. Pour la jeunesse actuelle, ira-t-elle voir ce film ? Pas sûr, le sujet lui paraîtra, historique, si loin d’elle. Que le film ait été récompensé à Venise, il y a évidemment de la politique là-dessous. On est en Italie avec un pape qui est contre l’avortement, c’est un film réalisé par une femme sur une femme, on est dans un processus d’actualité. Le résultat paraissait évident comme à Cannes. Y’aura-t-il des risques de contestations comme celles qu’on a connues avec des prêtres, des cathos, qui s’agenouillaient devant les salles en signe de protestation ? Pas sûr, cela démontrerait la force du film ! Malgré les qualités du film, on prenait plus de risque en 1965 avec  Le Journal d’une Femme en Blanc, d’Autant-Lara ou même en 1956 avec Des Gens Sans Importances de Verneuil ou Une Histoire de Femmes, de Chabrol, ou même avec Vera Drake de Leigh et surtout avec l’exceptionnel film de Christian Mungiu, 4 mois, 3 semaines, 2 jours. Il serait intéressant de savoir si on le présentera à la génération Netflix dans les lycées ? L’Evénement malgré ses qualités bien proprètes, bien de chez-nous, n’est qu’un film non-événement, simplement à la mode. La lutte quotidienne pour l’avortement demande plus !

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