PEINTRES FEMMES, 1780 -1830, NAISSANCE D’UN COMBAT
Musée du Luxembourg, 19 rue de Vaugirard 75006 Paris
exposition jusqu’au 25 juillet 2021
« Lorsqu’on considère ensuite le talent admirable des Guyard & des Lebrun, toutes les deux admises comme académiciennes, on serait tenté de demander pourquoi nos législateurs dans leurs nombreux décrets ont compté pour rien les femmes ? » Charles Villette , idée du salon 1791
« Une chose mon ami qui m’a toujours paru inconcevable est l’impudeur extrême des pères et des mères qui livrent leurs filles aux études de l’art de peindre.. » Philippe Chèry, critique et philosophe Paris 1791
Vous avez encore une bonne semaine pour aller voir, cette intéressante et très à la mode exposition qui encore une fois démontre que l’art n’a pas de sexe.
En effet toutes les toiles qui sont exposées dans ce petit musée du Sénat ont été peintes par des femmes et je défie quiconque de faire la différence entre ces tableaux et ceux d’artistes mâles de la même époque. Le seul hic c’est que ces femmes à l’époque n’avaient pas la même facilité d’aller dans les ateliers, de peindre ce qu’elles voulaient (interdit le nu !) et de pouvoir se faire exposer comme leurs confrères. Petit à petit elles ont réussi quand même à s’imposer.
Avec cette exposition on apprend qu’entre 1780 et 1830, les artistes femmes accèdent en France à une visibilité inédite. Avec 80 œuvres, est mis en lumière ce moment clé de l’Histoire où, transformé par la Révolution française, l’espace de production artistique s’ouvre enfin aux femmes. Maintenant est-ce que cette exposition est attachante au niveau de la peinture en tant que telle, c’est une autre chose. On y présente beaucoup de portraits de bourgeoises ou des thèmes pas très passionnants, et leur peinture est celle, classique, du XIXème. On peut reconnaître que leurs toiles sont très bien exécutées comme le faisaient les Girodet, Gros, David, Gérard, Chassériau, Ducreux, Regnault, et autres Bougereau, une peinture très académique.
L’exposition commence bien sûr avec la plus célèbre, Elisabeth Vigée Le Brun qui avait réussi à éviter la guillotine (pas celle qui est à ses côtés dans l’expo Rosalie Filleul De Besnes).
On avait eu droit à une expo indigeste de la Le Brun il y a quelque temps au Grand Palais.. Dans ce lieu sympathique, ce qui nous est offert est un peu répétitif, mais il y a quelques exceptions qui attirent nos regards. La toile de Nisa Villers (née Marie-Denise Lemoine 1774-1821) qui est aussi la très belle affiche de l’expo est magnifique. Cette femme laçant sa chaussure, anatomiquement mal formée, possède un côté très Ingres.
Nisa est née dans une famille favorable aux arts. On y trouve Marie-Victoire, Marie-Elisabeth Lemoine et la Jeanne Elisabeth Chaudet toutes peintres. Si elle porte le nom de Villers c’est qu’elle a épousé un élève de Girodet, Michel-Jean-Maximilien Villers.
Une jeune fille à genoux d’Aimée Brune (1803-1866) datant de 1839 est de belle facture, elle vient du Musée des Beaux-Arts d’Orléans. Ses toiles sont dans de nombreux musées et prouvent son réel talent.
Une petite peinture d’Isabelle Pinson (1769-1855), née Proteau, datant de 1808 a un aspect très moderne. Elle porte le titre de L’Attrapeur de mouche. On remarque dans le fond l’Ecole de Médecine, Pinson, son mari était chirurgien.
Des toiles anecdotiques sont intéressantes, elles montrent des ateliers de peintures ou des moments de scènes d’ateliers, peintures de Capet (1761-1868), Cogniet (1798-1869), Cogniet-Thévenin (1813-1892).
On peut admirer, une belle toile de la baie de Naples de Louise Joséphine Sarazin de Belmont (1790-1870) d’une longévité assez étonnante, lesbienne, première femme artiste de plein air, elle n’avait rien à envier aux peintres de paysages ou de l’école de Barbizon.
Ces quelques exemples de tableaux font que cette exposition organisée par Martine Lacas vaut le détour. Dépêchez-vous…