LES OLMÈQUES ET LES CULTURES DU GOLFE DU MEXIQUE
exposition jusqu’au 03 octobre 2021
Cora Falero Ruiz, conseillère scientifique, du Museo Nacional de Antropología, Mexico, et Steve Bourget, archéologue, responsable de collections Amériques au Musée du Quai Branly – Jacques Chirac offrent une exposition passionnante sur la civilisation Olmèque et sur un monde méconnu des cultures précolombiennes.
C’est au sud des états actuels de Veracruz et de Tabasco, que s’est épanouie la culture olmèque – du mot Olmán, « pays du caoutchouc » – donnant naissance à l’une des plus importantes et mystérieuses civilisations mésoaméricaines.
Une civilisation d’une profonde sensibilité artistique, restée méconnue jusqu’à la deuxième moitié du XIXeme siècle, qui a pourtant joué un rôle éminent dans l’histoire du Mexique et de sa région. En témoigne la mise en place d’une pensée et de canons mésoaméricains (économiques, sociaux, politiques, intellectuels et artistiques) qui perdureront jusqu’à la conquête espagnole.
En 1862, un archéologue qui fouillait au Mexique dans la région de Tres Zapotes (l’actuelle Veracruz) met au jour un bloc colossal de pierre de plus de 12 tonnes et 3 mètres de haut qui se révélera être la sculpture d’une tête humaine. José María Melgar y Serrano, qui a depuis longtemps l’expérience du terrain, n’a jamais rien vu de semblable. Il écrit dans son journal : «Ce qui m’a stupéfié, c’est le type éthiopien de cette tête. Fallait-il remonter aux premiers âges du monde pour trouver une explication à ce bloc de pierre? »
En 1925 l’ archéologue Frans Blom et l’ethnologue Olivier La Farge entreprirent d’explorer le sud-est du Mexique à la recherche de ruines mayas. En parcourant la région de Los Tuxtlas et le bassin du Rio Tonala, ils localisèrent de nombreuses sculptures olmèques, notamment à La Venta, où ils découvrirent la deuxième tête colossale. La fascination que les Mayas exerçaient à l’époque leur fit tirer de leurs observations une conclusion erronée : « […] Nous inclinons à attribuer ces ruines à la civilisation maya ».
L’olmécologie n’était donc pas encore née. L’ouvrage attira néanmoins l’attention de l’archéologue Hermann Beyer, qui porta le mot « olmèque » sur les fonts baptismaux dans ses écrits. Il s’inspira des mots « Olman » et « Olmeca », que les Aztèques employaient au XVIème siècle pour désigner la côte du Golfe du Mexique et ses habitants.
À la fin des années 1930 et au début des années 1940, l’archéologue Matthews Stirling mena sur les sites de Tres Zapotes, La Venta, San Lorenzo des fouilles spectaculaires et publia dans le National Geographic une série d’articles qui firent connaître largement la culture olmèque au grand public.
En 1939, Stirling découvrit à Tres Zapotes une stèle portant une date incomplète de ce que l’on appelle le compte long de la civilisation maya classique. En concluant qu’elle datait de 31 av. J.-C., Stirling ouvrit le débat sur l’ancienneté de la culture olmèque. Cette datation provoqua une véritable tempête dans le monde des américanistes, les mayanistes se refusant à admettre que la culture olmèque puisse être plus ancienne que la civilisation maya classique.
En 1942, la dénomination « Olmèque » fut officialisée, mais les mayanistes, qui soutenaient l’antériorité de la civilisation maya, se heurtèrent violemment à ceux qui, considéraient les Olmèques comme une « culture-mère ». Le problème ne fut tranché qu’en 1955 grâce à la datation par le carbone 14. Il s’avéra alors que les sites olmèques étaient encore bien plus anciens que Stirling lui-même ne l’avait pensé.
La culture olmèque apparaît aujourd’hui comme un ensemble multiethnique et plurilinguistique qui s’étend à partir de 2500 av. J.-C. jusqu’à 500 av. J.-C. sur une vaste partie de la Mésoamèrique. Ce territoire se présente comme un véritable dédale de cours d’eau divaguant dans des marécages difficiles d’accès.
Les chercheurs considéraient jusqu’à la fin du xxème siècle que cet environnement était hostile et peu propice à l’éclosion d’une civilisation, mais les avancées archéologiques ont établi qu’au contraire, l’abondance d’eau et la diversité écologique constituaient des facteurs favorables.
Cette impressionnante exposition présente plus de trois cents pièces, dont certaines sont montrées pour la première fois hors du Mexique. Elle dévoile l’immense diversité du monde précolombien des cultures du Golfe, une dynamique pluriculturelle qui se déploie à travers une multitude de traditions artistiques, croyances et rites, langages, et dans un tissu complexe de relations politiques et économiques.
C’est une exposition inédite qui nous invite à un voyage à travers plus de trois millénaires d’histoire, d’échanges, de traditions artistiques et qui porte encore aujourd’hui une part de mystère.
C’est un véritable défi de taille que s’est lancé le Musée du Quai Branly avec cette installation d’un ensemble d’objets représentant près de 20 tonnes ! Á ne surtout pas passer à côté !