13 Avenue du Président Wilson 75116 Paris
jusqu’au 10/09/2023
Le Palais de Tokyo est toujours le lieu où l’on ne sait jamais ce qu’il va se passer. Des attentes c’est sûr, des surprises quelques fois, des déceptions souvent. Cet été c’est l’occasion de découvrir trois artistes et une exposition collective qui partagent de nombreuses affinités.
Laura Lamiel et son univers Vous les entendez ? offre des installations, sculptures, peintures, dessins, films agencements subtil d’objets.
Conçue comme une installation globale en dialogue avec l’architecture, Vous les Entendez ? témoigne de la relation que Laura Lamiel entretient avec l’espace, qu’il s’agisse de celui de l’exposition ou de celui du travail.
Ponctué de pièces disséminées dans la totalité du niveau du jardin du Palais de Tokyo, le parcours conduit ainsi à découvrir les œuvres par touches chromatiques, à pénétrer dans une instance d’atelier-cerveau ou à se laisser guider par le son sur les rives du Gange.
Dans ses installations Lamiel joue sur opacité / transparence et avec des confrontations entre des contraires, telles que l’acier émaillé, le cuivre, le coton, le verre, l’encre rouge, le tissu, le miroir. Alors Introspective plus que rétrospective ?
La Morsure des Termites tente une relecture spéculative de l’histoire de l’art envisagée sous le prisme du graffiti.
Le graffiti non pas comme sujet ou esthétique, mais comme expérience, comme attitude, comme imaginaire, comme pensée souterraine.
Une expérience de l’illégalité et des vitres brisées, de l’errance des corps en mouvement, une attirance pour les perspectives sans lumière, un romantisme du vandalisme qui prend autant soin des choses qu’il ne les abime, une fascination pour les langages visibles ou invisibles qui se confrontent avec la matière précaire du réel, et qui se façonnent avec elle tout en la transformant.
L’exposition provoque un dialogue fragmenté, parfois cryptique, entre une cinquantaine d’artistes plus ou moins reconnu.es, voire pas du tout connu.es. On pénètre dans La Morsure des Termites par des rues hérissées d’enseignes qui sortent des murs, où l’œil ne voit pas des choses mais des figures de choses qui signifient d’autres choses.
Les Mountaincutters est un duo d’artistes formé en 2012, depuis leurs études à l’École Supérieure d’Arts et de Design Marseille Méditerranée. Il vit et travaille à Bruxelles. Depuis près de dix ans, Les Mountaincutters déploient des installations proliférantes à l’aspect transitoire. Pour leur exposition au Palais de Tokyo, Morphologies Souterraines, ils ont pensé une série d’installations témoignant d’une recherche anatomique et archéologique autour du corps absents – hors normes.
En écho avec le lieu, son architecture, ses fluides, ses respirations, le duo propose des objets et situations qui permettraient l’adaptation de corps vulnérables à un espace inadapté, voire inhospitalier. Engageant un dialogue à la fois thérapeutique, poétique et politique avec les lieux, l’exposition figure de nouvelles morphologies organiques, animales ou humaines.
Leur travail in situ propose un dialogue formel avec les lieux dans lesquels ils exposent. Acier, argile, verre soufflé, cuivre, laiton, kapok, agar dilué et autres liquides font parties d’une liste d’ingrédients organiques et industriels, récupérés et réassemblés, que Les Mountaincutters utilisent pour questionner les rapports entre corps, temporalité et espace-environnement.
Des thermomètres, de l’huile et d’autres liquides enregistrent les variations de chaleur aux côtés de sculptures de mains en bronze et de fémur néanderthalien en cuivre se greffant à l’espace et à son réseau d’eau chaude. Unies au lieu, modelées par ses flux, les sculptures enveloppantes convoquent des corps défaillants dont les prothèses, les excroissances et les extensions sont autant de stratégies d’adaptation à des environnements inhospitaliers.
Marie-Claire Messouma Manlanbien avec L’Être, L’ Autre et L’Entre, fait cohabiter les cultures dans un syncrétisme formel, cousant littéralement les unes aux autres des références spirituelles, symboliques, végétales et humaines. D’origine guadeloupéenne et ivoirienne, l’artiste s’initie aux activités manuelles dans l’enfance, auprès de sa mère et de sa grand-mère. Au travers d’installations mêlant textiles et sculptures, faites de rencontres entre des matériaux industriels comme l’aluminium, le cuivre et le laiton avec des matériaux naturels comme la fibre de raphia, la corde, la sève d’arbre et les coquillages. Selon ses mots, elle produit des écosystèmes où les matériaux entrent en relation et cohabitent. Elle élabore ainsi des paysages, des Maps [Cartes] dialoguant avec les pratiques de la cartographie, autant que des vêtures ainsi qu’elle les appelle et des objets du quotidien. Ses œuvres questionnent les rapports que l’être humain entretient avec son environnement et l’ensemble du vivant. Voilà de belles déambulations dans cet espace de béton, même si on ne saisit pas tous les sens de ce que proposent les artistes (il faut lire leur texte pour comprendre !). Si l’exposition donne à voir, elle engage également le corps des visiteurs dans une déambulation propice à considérer l’espace comme un lieu public où nous sommes en situation d’incapacité à tout saisir, mais il peut y avoir des moments d’émotions. À tenter donc.