Nous reprenons notre série VIVA L’OPÉRA, les salles de concerts n’étant pas encore libres d’accès, une manière de se souvenir des moments d’exceptions que nous ont procuré tous ces compositeurs, ces chanteurs, ces musiciens, ces chefs d’orchestre en espérant que nous pourrons revenir les écouter en direct très bientôt. Nous avions laissé Verdi avec Luisa Miller nous repartons avec un de ses opéras les plus célèbres : RIGOLETTO
Au début des années 185O Verdi est riche et n’est plus obligé de composer des opéras tous les huit mois. Il s’installe avec Giuseppina Strepponi, dite Peppina sa maîtresse, à Busseto puis à Sant’Agata. Les droits d’auteur lui permettent de prendre son temps pour choisir ces nouveaux thèmes. En 1853 il écrit un opéra sans avoir passé un contrat avec un impresario ou un éditeur : « Je suis inexorablement déterminé à ne plus m’engager pour une date fixe, ni pour la composition ni pour la représentation ». Après avoir composé un opéra Stiffelio qui eu un demi-succès, il songea à plusieurs drames de Hugo, Shakespeare, Racine, Chateaubriand, à l’été 1850 Piave travailla sur un nouveau drame de Hugo, qui serait aux dires de Verdi l’une des plus grandes créations du théâtre moderne: Le Roi S’Amuse.
Le livret à peine terminé il aura de nombreux problèmes avec la censure autrichienne à Venise. Celle-ci ne comprenait pas comment ces deux illustres artistes ont pu déployer leur talent pour une intrigue nommée La Maledizione (premier titre de l’opéra), répugnant exemple d’immoralité et d’une trivialité obscène. Victor Hugo avait eu les mêmes problèmes avec la censure de Louis-Philippe. Il fallut beaucoup de diplomatie à Piave et au directeur de la Fenice pour trouver des compromis. La cour de François Ier se transforma en la cour de Mantoue qui n’existe plus à l’époque, et le nom de Triboulet se changea en celui de Rigoletto.
RIGOLETTO est un opéra en trois actes sur un livret de Francesco Maria Piave d’après la pièce de Victor Hugo Le Roi S’Amuse. Il a été créé le 11 mars 1851 au théâtre de la Fenice à Venise. Il s’agit du dix-septième opéra du compositeur, formant avec Le Trouvère (1853) et La Traviata (1853) la trilogie populaire de Verdi. Drame de passion, de trahison, d’amour filial (amour incestueux ?) et de vengeance, Rigoletto offre une parfaite combinaison mélodique et dramatique que Verdi avait déjà esquissée dans Luisa Miller. Le rôle principal, Rigoletto n’a pas d’aria ! Une première dans les opéras composés par Verdi C’est lui qui créa ce fameux style de baryton si difficile à trouver aujourd’hui.! Le Duc est tellement monstrueux que le premier ténor du rôle aurait demandé à Verdi de lui écrire un air lui donnant quelques émotions sympathiques et c’est ainsi qu’il écrivit ella mi fu rapita (Elle me fut ravie) air qu’il fut bisser à la première. Quand même une fille qui se sacrifie pour un type qui l’a fait enlever, séquestrer, qui l’a violée, et à la fin elle n’est pas bien achevée par un professionnel il y a de quoi… rigoler ! Malgré toutes les incohérences du livret, certaines sûrement dues à la censure, Rigoletto a eu un énorme succès..et cela dure encore même s’il est compliqué de trouver une bonne distribution de nos jours.
« Nous fûmes hier littéralement submergés par de la nouveauté : par la nouveauté ou plutôt la singularité du sujet ; par la nouveauté de la musique, de son style, des formes musicales, à tel point qu’il ne nous fut plus possible de nous forger une opinion précise à ce sujet. […] Le compositeur ou le poète ont été pris d’un amour tardif pour l’école satanique […], cherchant la beauté et l’idéal dans le difforme et le repoussant. Je peux difficilement louer ce goût. Cependant cet opéra obtint un franc succès, et le compositeur fut acclamé après chaque numéro, rappelé, applaudi, et deux airs durent être redonnés. » Gazzetta ufficiale di Venezia, 11 mars 1851
Argument :
La scène se passe dans une grande salle du palais où le duc de Mantoue donne un bal. Un de ses courtisans attire l’attention du duc sur un groupe de dames, parmi lesquelles se trouve la comtesse Ceprano. Le duc s’approche d’elle, le comte Ceprano a remarqué son manège et Rigoletto, le bouffon de la cour, le nargue. Un autre courtisan annonce qu’il vient de découvrir que le bouffon a une maîtresse. Le duc est en colère à cause de la présence de Ceprano qui empêche toute intrigue avec la comtesse. Rigoletto lui suggère alors d’enlever cette dernière et d’éliminer le comte. Des courtisans se promettent, avec Ceprano, de se venger du bouffon. Rigoletto fanfaronne au motif que nul n’osera porter la main sur lui. Soudain, le vieux Monterone fait irruption et vient, devant toute la cour, dénoncer les mœurs du duc. Rigoletto, le tourne en dérision. Le duc fait arrêter Monterone qui lance alors une malédiction contre Rigoletto et le duc. Rigoletto rentre chez lui et il est accosté par un tueur à gages, Sparafucile, qui lui propose ses services. Rigoletto déplore sa situation à la cour et exprime sa haine des courtisans, qui ne cessent de le haïr et de le mépriser. Il ouvre sa porte et se trouve accueilli par sa fille Gilda. Ceprano et d’autres courtisans qui veulent se venger des moqueries de Rigoletto enlèvent la supposée maîtresse. Désespéré d’avoir perdu sa fille, le bouffon erre dans le Palais ducal, avant de réaliser bientôt que Gilda est en compagnie du Duc de Mantoue avec qui elle a passé la nuit. Il injurie les courtisans, avant de tomber à leur pied, suppliant qu’elle lui soit rendue. Rigoletto décide alors de se venger malgré la demande contraire de Gilda. Près d’une auberge délabrée, sur les rives du Mincio. Sparafucile, dit à Rigoletto que le duc est là. Gilda en voyant son amoureux entrer dans l’auberge et demander une chambre est alors anéantie en découvrant l’infidélité de son bien-aimé. Rigoletto veut éloigner sa fille, il lui demande de revêtir un costume masculin et de s’enfuir à Vérone. Mais Gilda revient, travestie en homme, et s’approche de l’auberge. Elle entend Maddalena demander à son frère d’épargner le bel inconnu. Sparafucile accepte un compromis : à la place, il tuera la première personne qui se présentera à l’auberge. À ces mots, Gilda frappe à l’auberge et demande à entrer. Quand Maddalena lui ouvre, un terrible coup de tonnerre retentit, couvrant les cris de la malheureuse, au moment où l’assassin la frappe. L’orage s’apaise peu à peu. Rigoletto revient chercher le cadavre du duc. Sparafucile sort en traînant un sac. Rigoletto entend soudain la voix du duc chanter au loin La donna è mobile. Tremblant, il déchire le sac, et, horrifié, y trouve sa fille mourante. Éperdu de douleur, Rigoletto prend sa fille dans ses bras, tous deux chantent alors des adieux déchirants. Au moment où elle expire, il comprend alors que la maledizione de Montérone s’est réalisée !
Vienne 1982 – Rigoletto: Ingvar Wixell, Duc de Mantoue: Luciano Pavarotti, Gilda: Edita Gruberova, Sparafucile: Ferruccio Furlanetto Maddalena: Victoria Vergara, Giovanna: Fedora Barbieri, Ceprano: Roland Bracht, Contesse Ceprano: Kathleen Kuhlmann, Orchestre Philharmonique de Vienne sous la direction de Riccardo Chailly, mise en scène Jean-Pierre Ponnelle,
Bonus: Alfredo Kraus peut-être le plus beau Duc de Mantoue dans le tube de l’opéra: La Donna e Mobile