Forum des Halles, 2 rue du cinéma, 75001 Paris
séances du 12 au 15 septembre 2021
Avez-vous remarqué que même les salles du Forum des Halles tremblent pendant le Festival ! D’accord on est aux Halles et les métros passent et repassent, mais quand même ça rajoute un peu de frissons. Des frissons on en a eu quelques-uns.
Avec Censor de Prano Bailey-Bond par exemple. C’est un premier film passionnant tant au point de vue du fond que de la forme. On suit cette jeune femme, Enid, qui nous entraîne dans son cauchemar schizophrénique où l’horreur nous est distillée avec perversité, digne films des années 70-80. Sous le règne de Thatcher, Niam Algar chargée de censurer le cinéma bis, cause des meurtres quotidiens dans cette Angleterre puritaine, va se perdre et nous avec dans ses souvenirs. Réalité, fiction, on ne sait plus où on en est et nous sortons de la salle assez secoué, comme les fauteuils de la salle 500…. On espère que le film sera distribué pour que vous puissiez vivre cette expérience sensorielle si vous n’étiez pas dans la salle. Une séance de rattrapage aura lieu demain ! Il y a de nombreuses lignes de métro qui vous amèneront au Forum si vous êtes parisiens.
Trois heures et demie à se perdre dans les méandres philippins. Mafiosi pourris, politiques et journalistes corrompus à la sauce meurtre c’est ce que nous propose Erik Matti avec son film On The Job :The Missing 8. On ne s’ennuie pas, mais on est perdu avec tous ces protagonistes aux noms de code assez amusants (ce sont des noms de crooners américains). Ce film politiquement pas correct est accompagné tout le long de sa progression dramatique par des chansons américaines et philippines. On sait que le karaoké est très prisé dans ce pays et certaines de ses chansons ont un sens politique ; les sous-titres sont nécessaires pour comprendre quelque chose à l’histoire. Bon dans le scénario il y a quelques invraisemblances mais le film est fort prenant et on n’a vraiment pas envie d’aller passer ses vacances dans cette contrée ! Matti n’a pas sa caméra dans sa poche et ose attaquer frontalement le système pourri de son pays sous la dictature effroyable de Rodrigo Duterte.
Jeong-Won Shin lui nous repose de toutes ces émotions avec sa comédie science-fiction Night of The Undead. Il traite le problème des aliens avec beaucoup d’humour. Courses poursuites, quiproquos, tous les ingrédients pour faire une comédie sympathique sont là. C’est une sorte de Body Snatchers loufoque. Night of The Undead et l’opposé du Dernier Train pour Busan et Lee Jung-hyun nous montre un autre registre de ce qu’elle faisait dans Peninsula. De l’émotion, du suspens, c’est Soi Cheang qui les distillent avec beaucoup de talent dans Limbo.
Il filme Hong Kong comme on ne la jamais vue. C’est une ville crépusculaire, en noir et blanc, où les immeubles des beaux quartiers côtoient des sortes de ghettos bidonvilles où pourrissent des poubelles et des corps de femmes à la main gauche coupée ! Les protagonistes sont tous dépressifs dans cet univers glauque et tentaculaire ! Soi Cheang maîtrise parfaitement son sujet et ses plans sont d’une exceptionnelle virtuosité. La chorégraphie des poursuites et des combats pour survivre, sont absolument remarquables.
Siu-Keung Cheng le chef opérateur doit être signalé tant ses cadrages et sa photo sont d’une beauté terrifiante. L’actrice principale, Liu Yase, accepte de faire des choses étonnantes, sûrement elle n’a pas dû sortir indemne des séquences que lui a fait subir le réalisateur. Mais la magie on l’a eu avec le film d’animation de Phil Tippett,
Mad God. Une séance de rattrapage a lieu aujourd’hui ! C’est un film qu’il faut voir sur grand écran et c’est au Forum qu’il est excellent. C’est un rêve, un cauchemar, complétement fou. Phil Tippett a mis des années à le construire. Il repousse dans des espaces inconnues tout ce que l’imagination peut créer. C’est énorme, c’est et sera un film culte. Hélas le DVD, s’il existe un jour, ne pourra jamais offrir cette dimension spectaculaire. Il faudrait créer une salle pour le projeter à l’infini. Mad God est et sera le clou de cette 27ème édition du Festival de L’Étrange… Merci messieurs les programmateurs et autres directeurs artistiques d’avoir pu nous offrir un tel film !… à suivre