Auditorium de la Maison de la Radio et de la Musique
116 Avenue du Président Kennedy, Paris 75016
4 mars 2021, 20h
Claude Debussy : L’Isle Joyeuse (orchestration de Bernardo Molinari)
Sergueï Prokofiev : Concerto pour violon n°2
Igor Stravinsky : Le Chant du Rossignol
Béla Bartók : Suite de Danses BB 86
Sergey Khatchatryan, violon
Orchestre National de France
Santtu-Matias Rouvali, direction
Sergey Khatchatryan : « Enfant, j’adorais l’ambiance des représentations : monter sur la scène, les applaudissements du public… C’est fantastique ! » Hélas cher Sergey, les applaudissements c’est l’orchestre et les quelques privilégiés, dont moi-même, qui te les ont prodigués. Et ils étaient bien mérités ! Il faut dire que ce concerto, comme ceux de Chostakovitch, tu le portes en toi, c’est une musique qui t’inspire, qui te parle. J’ai eu la chance de te suivre dans ton Arménie natale, dans ton milieu familial, si important pour toi, là où tu as vécu, de visiter avec tes parents des lieux de mémoire des temps anciens, de t’écouter dans le festival de musique à Erevan dont ton père en est l’initiateur. Tu avais interprété entre autres le quatuor n°8 de Chostakovitch qui te bouleverse tant, car tu y en ressens toute la douleur, comme celle du peuple arménien qui vient encore de subir les tourments de la guerre. Cette souffrance tu la portes en toi et ton violon l’exprime sublimement. L’ONF sous les doigts virevoltants de Santtu-Matias Rouvali t’a accompagné avec bonheur, mais il manquait ce public qui fait que ce grand absent s’est fait sentir, une autre souffrance ; toi tu étais dans ta bulle…et ton violon parlait superbement pour nous. Merci pour ce moment d’enchantement.
Bon l’ONF a aussi interprété Debussy, Stravinsky, Bartók et il faut dire que la chorégraphie du chef d’orchestre nous a émerveillés – dommage pour les auditeurs – et aussi ce qu’il a réussi à faire de l’orchestre pour qu’il oublie qu’il jouait que pour des micros.
©Christophe Abramowitz
Précision du geste, petits mouvements de rotation de la main gauche avec un doigt pointant vers l’instrument qui devait réagir, amples mouvements des deux mains pour les grands instants des tous ensembles, Santtu-Matias Rouvali dessinait, dansait, la musique dans les airs vides de l’Auditorium. Chaque instrument devenait ainsi sous ses mains une entité, un soliste. Il faut dire que les œuvres de Stravinsky et de Bartók s’y prêtaient. Avec cette forte gestuelle Santtu-Matias Rouvali arrivait à insuffler l’énergie nécessaire, surtout dans les danses de Bartók.
Le Debussy sous ses doigts agiles était devenu poésie malherbienne…
« Vertige ! voici que frisonne
L’espace comme un grand baiser
Qui, fou de naître pour personne,
Ne peut jaillir ni s’apaiser. »
Une soirée faite de petits bonheurs en somme !