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« MAISON DE LA RADIO ET DE LA MUSIQUE » : ADÈS PAR ADÈS

Thomas Adès, Compositeur, Chef d’Orchestre

auditorium de radiofrance

116 Avenue Kennedy , 75016 Paris

Vendredi 8 octobre 2021

Leoš Janáčeck :

Mládi pour six instruments à vent

Sinfonietta

Thomas Adès :

Tower – for Frank Gehry

Concerto pour piano

The Exterminating Angel Symphony

Orchestre Philharmonique de Radio France

Ji-Yoon Park, violon solo

Magalie Mosnier, flûte

Victor Bourhis, clarinette basse

Olivier Doise, hautbois

Antoine Dreyfus, cor

Julien Hardy, basson

Jérôme Voisin, clarinette

Kirill Gerstein piano

Thomas Adès, direction

Thomas Adès ouvre cette série de concerts consacrés aux compositeurs-chefs d’orchestre. Outre ses trois œuvres, une première en France, il les associe à deux compositions de Leoš Janáčeck qu’il place très haut dans son panthéon de compositeurs. Il a en tant que pianiste enregistré l’intégrale de ses œuvres pour piano. C’était dans une salle au trois quart vide – le public français, conservateur, est toujours frileux d’écouter ce qu’il ne connait pas, de faire des découvertes – où les cuivres étaient à l’honneur. Adès aime quand ça gronde, il aime l’énergie. Il suffit de le voir diriger pour le sentir. La longueur inhabituelle de ce concert l’a totalement exténuée tant il s’est physiquement investi !

Il a commencé avec une sorte de fanfare – Tower – avec 14 trompettes comme Janáčeck pour sa Sinfonietta. C’est une composition très courte, de trois minutes, claire, lumineuse, aérienne. Les musiciens étaient placés dans les hauts de l’auditorium, des espaces désespérément vides, créant un effet saisissant !

Retour sur terre avec une œuvre de Janáčeck plus intime, Mládi qui veut dire jeunesse en Tchèque, composée à soixante-dix ans ! Le sextuor du Philhar était à l’unisson pour jouer cette composition dont les thèmes avaient des réminiscences de chants populaires. Sachant la complexité rythmique de cette œuvre, les six solistes de l’orchestre en ont donné une exécution exemplaire.

Le Concerto pour piano d’Adès qui suivi est plein de fougue, très ravélien, avec des réminiscences jazz (on entend quelques notes de I Got Rythm de Gershwin). La composition même si elle est de conception classique n’a rien à voir à ce qu’on a l’habitude d’entendre. Le piano joue pratiquement tout le temps, va être submergé par l’orchestre qui gronde et qui petit à petit nous entraîne dans une conclusion énergique et brillante, la signature d’Adès, mais aussi terriblement tragique. Lumière et ténèbres vont de paire. Œuvre récente – elle date de 2019 – on espère qu’elle restera au répertoire du Philhar, nous aimerions l’entendre de nouveau.

Cette énergie, cette violence on la retrouve dans la suite The Exterminating Angel Symphony que le compositeur a écrite à partir d’extraits de son opéra L’Ange Exterminateur. Il s’est inspiré du film de Buñuel, une histoire surréaliste de bourgeois après une soirée à l’opéra qui n’ont pas la possibilité de sortir du lieu où ils se retrouvent. Adès va ajouter à ce huis-clos des éléments de comportements hystériques, de folie. Ayant eu l’occasion d’assister à une représentation de l’opéra dans la mise en scène originale et dirigé par le compositeur, l’ambiance n’était pas de tout repos ; les chanteurs doivent avoir des qualités vocales impressionnantes, on est dans du Richard Strauss revu et corrigé à la sauce Adès, où Elektra se marie avec la Maréchale (du point de vue musicale bien entendu). La suite donne quelques aperçus de cette violence orchestrale où l’Enfer c’est les autres ! On a quand même un moment qui rompt avec cette agressivité permanente, une berceuse, un duo d’amour mélancolique.

La Sinfonietta de Janáčeck qui suit ce moment de bruits et de fureurs, nous ramène à des éléments que l’on connait mieux. Les cuivres du Philhar au début et à la fin de l’œuvre sonnent merveilleusement et Adès entraîne les musiciens avec une force, une énergie impressionnante.  Grâce au podcast de France Musique, on peut écouter ce concert qui fera regretter aux auditeurs parisiens de ne pas être venus entendre et voir en direct toute cette fougue, ce talent, que nous a offert Thomas Adès ! Á bientôt, nous l’espérons, cher Monsieur.

photo de répétition d’Adès: ©Mathias Benguigui

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