UA-159350346-1

 « MUSÉE D’ART MODERNE DE PARIS » : MATISSE ET MARGUERITE

11 Avenue du Président Wilson 75116 Paris

Jusqu’au 24 août 2025

Le Regard d’un père

Bon, à force de voir du Matisse partout, sur les sacs en toile, dans les vitrines arty, dans les salles d’attentes des médecins, des dentistes, on en oublierait presque que le bonhomme avait une vie, une fille, et des liens bien plus complexes que ceux des papiers découpés.

L’exposition Matisse et Marguerite, c’est un peu la revanche de l’ombre : celle de Marguerite Duthuit, sa fille, sa muse, sa mémoire (1894-1982). C’est une exposition discrète, comme un murmure entre deux générations, dans les grands murs blancs du MAM. C’est doux, c’est puissant.

©DR

On en ressort avec l’impression d’avoir surpris une conversation intime, un dialogue à travers le pinceau, les lettres, et les regards.

Elle n’était pas la fille de, elle était la gardienne de. Marguerite, que Matisse appelle dans ses lettres ma complice, mon œil, a été modèle, secrétaire, archiviste, légataire universelle… bref, le cloud avant l’heure. Une œuvre en soi, mais pas dans le sens galériste du terme. Elle n’a rien signé, mais tout orchestré.

Les commissaires ont eu la délicatesse de mêler les portraits de Marguerite aux correspondances, aux photos inédites, aux carnets de croquis griffonnés comme des confidences. On y découvre une femme à la fois effacée et déterminante. Si Matisse est devenu Matisse, c’est aussi grâce à elle.

Derrière chaque œuvre iconique, il y a Marguerite qui veille, relit, cadre, défend. On aimerait que tous les génies aient une Marguerite. Dans les salles, un parfum de tendresse flotte entre les toiles. Ce n’est pas l’amour-passion façon Picasso et Dora, c’est l’amour-fidélité, l’amour-intelligence.

Le parcours propose un accrochage sensible : des portraits de Marguerite par Matisse, bien sûr certains bouleversants. À noter aussi, les sections sur l’après-Matisse : comment Marguerite a patiemment construit le mythe, défendu les œuvres, parlé dans les colloques, classé, archivé, aimé, encore. Jusqu’à sa mort, elle a été la mémoire vivante d’un homme qui peignait avec des ciseaux.

Marguerite nous rappelle que les grands artistes n’existent jamais seuls. Et parce qu’on y voit du Matisse autrement : pas le pape du fauvisme, mais un père. Un homme qui écrit à sa fille : « Tu es mon regard quand je doute ». Matisse n’a jamais été aussi touchant que quand il trace un visage en trois lignes. Beinh oui on ne fait pas du Matisse sans marguerite.

Articles similaires

Laisser un commentaire