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[ENTRETIEN] – Annick MASSIS, soprano presque incognito

Certains Français sont plus connus à l’étranger que dans leur propre pays. Cette semaine, j’ai rencontré Annick Massis, la soprano.

Il semble que les artistes de variétés françaises comme de musique électro plaisent à l’international. La « French touch » aussi est toujours à la mode. Des groupes comme M83, Justice, Woodkid, ont pris aujourd’hui la relève même s’il n’y a aucune comparaison avec Daft Punk ou David Guetta. Dans la chanson, Zaz commence à se faire connaître en Europe mais n’est pas encore prête à remplir des stades comme des Mireille Mathieu, Patricia Kaas et d’une certaine façon Mylène Farmer. Mais dans le domaine de la musique classique, il existe des interprètes immensément appréciés dans le monde entier, qui jouent, dansent, chantent, dans les plus prestigieuses salles d’Europe, des Amériques, d’Asie et dont les noms sont à peine connus par le public français et surtout ignorés par la critique dite spécialisée. Nous aimons les chemins de traverse est, intéressée à ces personnalités on a pu en rencontrer quelques unes. D’abord, galanterie oblige, c’est avec la soprano Annick Massis que l’on va commencer. Cette chanteuse, tout ce qui a de plus parisienne – elle est née dans le 15ème arrondissement – est devenue chanteuse lyrique sur le tard. Nous l’apprécions car sa « carrière » et son répertoire sont totalement atypiques pour une soprano. C’est dans un troquet, près de la gare de Montparnasse, qu’elle nous a donné rendez-vous en toute simplicité. Heureusement ses nombreux fans – oui il y en a quand même en France – n’étaient pas au courant car nous n’aurions pas pu faire l’entretien qui suit. Il a été enregistré juste avant son triomphe le 29 avril dans un récital à l’amphithéâtre de l’Opéra Bastille.

Chère Annick, comment va votre ego ?
Mon ego (rires)….Il en faut d’abord pour chanter et ça m’a pris du temps pour le reconnaître, savoir qu’il était quelque part ; je l’ai fait sortir et finalement ce n’était pas essentiel. Pour entrer sur une scène, il en faut c’est vrai, il faut être un animal rien que pour faire trois pas, vous voyez je me branche tout de suite sur la scène, là l’ego doit servir, après ça… vaste programme,
A quel âge avez-vous eu envie de monter sur une scène ?
Je ne me souviens pas de ne pas avoir eu envie de chanter, de monter sur une scène ; Maman chantait l’opérette, papa après des études d’ingénieur est entré dans le chœur national de Radio France ; si vous voulez j’étais dans le bain, même si on m’en a empêché, c’était une évidence pour moi.
Vos parents ne voulaient pas que vous fassiez ce métier ?
Oui, par protection; alors j’ai suivi les pas de ma grand-mère, dans l’enseignement.
Quelles études avez-vous faites ?
J’ai fait un deug d’anglais, une licence d’histoire et quelques bricoles comme ça et puis j’ai passé le concours de l’Ecole Normale pour devenir institutrice, pour suivre les pas de ma petite mamie et puis voilà, j’ai été enseignante ; mais chassait le naturel, il revient au galop, c’est à dire à partir du moment où j’ai pu avoir un minimum d’expérience dans l’enseignement, la première chose que j’ai faite c’est de décloisonner les matières, c’est à dire immédiatement à faire des expériences de Montessori dans des classes qui n’étaient pas encore éveillées pour ça, à faire des images séquentielles au travers de « L’Enfant et les Sortilèges » (ndlr de Ravel), au travers de l’écoute de la musique, du dessin ; à l’époque il y avait déjà des enseignants de sport mais j’en faisais faire en plus et puis certaines circonstances sont arrivées qui ont fait que je me suis lancée dans le chant.
A but professionnel ?
Très tard, vers une petite trentaine d’année.
C’est assez tard non ?
Disons atypique, mais Pavarotti a été instituteur, beaucoup moins de temps je crois ; la musique me manquait trop et je pense que quelque part ça venait du milieu dans lequel je baignais. J’ai su par la suite que mon grand-père maternel avait fait de la musique ; il jouait dans les kiosques à musique avec une harmonie, je l’ai appris très tard, car je ne l’ai pas connu.
Vous étiez institutrice à Paris ?
Oui oui à Paris, je suis une vraie parigote. J’ai enseigné dans beaucoup d’arrondissements, j’ai même fait les portes parisiennes qui comme vous le savez sont les moins faciles, car lorsque je suis entrée à l’Education Nationale j’étais suppléante avant de passer le concours, et on donnait à mon innocente fraîcheur des classes difficiles mais qui m’ont beaucoup apprise, j’ai même fait des classes inadaptées, c’était très dur mais extrêmement enrichissant.
Lorsque vous êtes arrivée sur un plateau vous étiez donc armée face à la difficulté des rapports qui existent.
Oui mais j’étais tellement gourmande, les yeux grands ouverts, j’étais comme une éponge, c’est souvent ce qu’on m’a dit ; c’est un monde que je connaissais du fait que maman chantait souvent à Mogador et quand j’étais dans les coulisses je buvais absolument tout, je faisais qu’un avec ce milieu.
Avez-vous chanté de l’opérette ?
En France on met une étiquette qui n’est pas très saine sur l’opérette. C’est un art qui est extrêmement difficile et pour lequel il faut énormément de qualités et qui est mal considéré. Les Français ont déjà du mal à aimer leur musique, alors vous pensez bien que chanter de l’opérette ce n’est pas évident.
Ils ont du mal à aimer aussi leurs chanteurs ! 
Oui c’est assez compliqué et je ne sais pas pourquoi ?
Ce n’était pas évident d’entrer dans monde de l’opéra? Quelqu’un vous a entendu ?
Ce n’est pas tout à fait comme cela que ça s’est passé ; j’étais enseignante et tous les jours à la pose déjeuner, c’était évident pour moi, j’écoutais de la musique, parfois j’achetais les partitions ; et un jour mon ex mari, m’a dit, écoute donne toi les moyens, fais quelque chose. On va en vacances dans le Gers, on va assister à une master-class que donnait madame Crespin avec Denise Dupleix ; en sortant j’ai pris une brochure et je lis que madame Dupleix organise une master-class à Saint Céret ; Mon mari me dit pourquoi tu n’y vas pas ! Je n’osais pas ; et là il s’est passé une chose incroyable ; on était donc effectivement dans le Gers, dans un gîte où nous passions notre été et nous sommes allé à la master-class. Je n’osais pas entrer dans la salle, j’ai attendu la fin et je suis allé voir madame Dupleix; il fallait être culottée car je lui ai demandée si elle voulait bien m’écouter et me faire travailler. Elle me dit mon petit je suis très occupée mais bon chantez-moi quelque chose. La pianiste avec qui j’ai beaucoup travaillé ensuite, Sylvie Vartrope, me propose de chanter Adèle de « Mein Herr Marquis » de Strauss que je connaissais; j’ai été extrêmement déçue car elle m’a dit qu’elle n’avait pas le temps de s’occuper de moi mais a proposé à Sylvie de me trouver quelqu’un. Elle m’a conseillé un professeur, Isabel Garcisanz (cantatrice célèbre, professeur à l’Ecole Normale) avec qui j’ai travaillée pendant quelques années et une grande partie des débuts de ma carrière ; à peine deux ans après avoir travaillé avec Isabel, elle a fait une master-class et j’y suis allée. Après ce cours, il y avait un concert de fin de stage ; il y avait un monsieur qui avait une belle voix de baryton et qui vendait des voitures de pompier. Ce jeune homme m’a dit que je devrais être sur une scène avec la voix que j’avais et il me propose de rencontrer quelqu’un. Et ce quelqu’un était Gabriel Dussurget (ndlr mécène et fondateur du Festival d’Aix en Provence) et tout a commencé à ce moment là !
Annick Massis doit sa carrière à des voitures de pompier !
Vous vous rendez compte ! Et il a eu bien raison ! C’est incroyable ! Et là j’ai commencé mes premiers concerts d’oratorios à Saint Germain ; il m’a fait connaître Jean-Marie Poilvé (ndlr agent artistique) et c’est parti comme ça !
Comment Gabriel Dussurget vous a fait connaître Jean -Marie Poilvé ?
Lorsque j’ai passé une audition pour Gabriel Dussurget, il m’a proposé de revenir la semaine prochaine, là il m’a demandé de lui chanter quelque chose ; je pensais que nous étions tous les deux ; mais Jean-Marie Poilvé était dans la pièce du fond et je ne le savais pas. A la fin de ces trois ou quatre airs que je lui ai chantés, un extrait de la Messe en ut de Mozart, une mélodie de Milhaud, Jean-Marie est sorti et m‘a dit mademoiselle nous allons nous occuper de vous ; je ne me suis pas rendu compte sur le moment ; j’ai dit très bien, merci monsieur. Gabriel me dit ne bougez pas, je vais donner un coup de téléphone ; il a appelé Bernard Thomas qui était chef d’orchestre à Saint Germain et la semaine suivante je passais une audition devant Bernard avec qui j’ai pas mal travaillé après ; quand j’y repense c’était merveilleux ; c’est pourquoi je dis à mes élèves que tout est possible, il faut y croire. J’étais dans l’amour de la musique, de la passion.
Lorsque l’on regarde tous les rôles que vous avez interprétés, appris, vous avez fait tout le contraire des sopranos lambda, ce sont pour la plupart des opéras qui ne sont pas tellement du répertoire ?
Oui ça correspond à une grande curiosité de ma part ; je ne me rendais pas compte, mais j’ai dévoré, mangé la musique, je dormais avec les partitions tellement je pensais avoir du retard par rapport à mes collègues qui n’avaient peut-être que cinq ou huit ans de plus et qui faisaient des rôles comme Juliette (ndlr Roméo et Juliette de Gounod) de Traviata (de Verdi), des rôles du répertoire ; en plus ma voix était encore très légère, c’était impensable au début d’aborder ces rôles comme Lucia (de Donizetti) ou Traviata et c’était très bien parce que ça m’a permis d’apprendre beaucoup d’autres rôles et de protéger ma voix.
Mais ces rôles du répertoire, on ne vous les proposait pas?
Si mais j’ai mis deux ans avant d’accepter. C’est aux Etats Unis où les gens ont un esprit plus ouvert que j’ai commencé à les chanter. Lorsqu’ils pensent que quelqu’un a du potentiel ils y vont, ils tentent. J’ai été très critiquée par des directeurs de théâtre, même des critiques à cause de mes refus. Il y a un directeur de théâtre qui m’en a voulu parce que je n’avais pas accepté un rôle. Je ne me sentais pas prête pour servir cette musique.
Et peut-être ne seriez-vous plus là ?
Exactement, il est revenu en arrière et a compris ma démarche.
Alors pourquoi ce parcours atypique ?
C’était inconscient, mais je m’en rends compte seulement maintenant ; j’aurais fait une carrière très ennuyeuse si je n’avais chanté que les cinq ou six opéras du répertoire; lorsque l’on parle de carrière, il faut qu’elle s’appuie sur une recherche humaine, une curiosité ; je ne sais pas jusqu’où je vais pouvoir aller mais j’y vais ! C’est grâce à mon agent qu’on me propose des rôles aussi différents.
Est-ce que vous regrettez d’avoir commencé si tard ?
Non parce que cela voudrait dire que je regrette d’avoir commencé ! Non parce que quand je suis arrivée dans ce milieu, j’avais une expérience humaine et j’ai abordé les choses différemment avec beaucoup plus de modestie et de discrétion.
Il y a eu un moment où le chant français était absent des scènes, vous, vous êtes arrivée avec ce renouveau ?
Oui, peut-être trop…joker !…il y aurait beaucoup à dire là-dessus.
Bon, on passe alors. Cette période baroque comment est-elle arrivée ?
J’ai commencé par le XIXème français, j’ai adoré, j’ai été une des premières à rechanter Hamlet (ndlr d’Ambroise Thomas), Jean-Marie m’avait dit pourquoi voulez-vous chanter ça, vous ne le rechanterez jamais ; il s’est trompé !
C’est un rôle très lourd ?
Oui mais Ophélie correspondait tout à fait à mon tempérament ; je voulais aussi chanter la Comtesse Adèle du Comte Ory (ndlr de Gioacchino Rossini), allez savoir pourquoi ! Je trouvais ce rôle très bien, les vocalises n’étaient pas dénuées de sens, Pour Hamlet il y avait un côté dramatique…pour revenir au baroque j’ai dû commencer avec Malgloire et puis il y a eu cette vague baroque ; je suis arrivée à la fin de l’entre deux périodes et j’ai appris beaucoup, l’art des trilles, cette technique si spéciale, la déclamation française ; déjà dans le XIXème la prosodie est importante, mais dans cette musique elle est primordiale. Cet apport là j’ai pu le réutiliser sur le Bel Canto italien ou franco-italien. C’est extraordinaire.
Parlez-moi de la Dame Blanche de Boieldieu ?
Je n’ai fait que le disque et le chef d’orchestre Marc Minkowski me demandait de rouler les rrr ; ça me posait des problèmes alors que j’ai tout à fait connu ce mode de prononciation parce que j’ai une partie de ma famille qui vient de la campagne ; mais comme je faisais la Dame Blanche j’étais un peu épargnée, mes collègues eux roulaient les rrr.
Vous avez fait quelques disques avec Marc Minkowski ?
Oui des Haendel et des Rameau, magnifique !
Et à l’Opéra Garnier, vous étiez dans cet extraordinaire Platée !
Oui le rôle de la Folie, une production exceptionnelle de Laurent Pelly. Si je devais la rechanter, je le ferais beaucoup plus barge que cela. Un grand souvenir de ma carrière.
Alors pourquoi à l’Opéra de Paris vous n’avez pas chanté plus que cela !
Joker ! Ce n’est pas moi qui décide, j’ai fait beaucoup de baroque à l’Opéra Garnier et on m’a cantonnée dans ce répertoire. Quand je suis revenue à l’opéra plus traditionnel, les gens ne m’ont pas suivie. A la Bastille j’ai fait il y a huit ans une Eudoxie (ndlr La juive de Halévy) qui était seulement un deuxième rôle alors que je faisais Lucia au Met, « Lucio Silla » à la Fenice, « Il Viaggio  à Reims » à la Scala ; en France on ne s’est pas intéressé à ce que je faisais, mais ce n’est pas grave l’important c’est que je l’ai fait. Il serait stupide de se cantonner à faire une carrière que dans l’hexagone.
Les Italiens si je comprends bien, eux vous ont appréciée ?
Oui, surtout si vous êtes Française, que vous interprétez des rôles comme « Lucia, Traviata », le répertoire italien qu’ils connaissent par cœur ; je peux vous dire que la première fois je n’étais pas fière, évidemment quand j’ai chanté à Caracalla ça était un sommet !
Vous avez interprété des Rosini qui ne sont pas du répertoire ?
Absolument, mais cela était un concours de circonstances. La première personne qui m’a invitée à la Fenice, c’était pour une chose qui ne m’intéressait peu, je ne vous dirai pas ce que c’était ; bref elle me proposa ensuite « Les Pêcheurs de Perles » là j’ai dit d’accord et je pouvais présenter cette musique aux Italiens. Ma voix n’était plus blanche, j’avais travaillé le bel canto, je connaissais la ligne de chant, c’est ce que je voulais approfondir. A la Fenice je suis tombée sur Marcello Viotti (ndlr célèbre chef d’orchestre suisse directeur de la Fenice), superbe rencontre, essentielle pour moi parce que je sortais du baroque, du XIXème français, et je savais que je pouvais chanter autre chose. J’étais très métrique à cette époque; à la fin de la première musicale Marcello me voyant vocaliser à une rapidité incroyable, m’a regardée et m’a dit : « C’est superbe, mais sais-tu que tu peux prendre ton temps ? Sais-tu que tu peux respirer ? ». Là j’ai écarquillé les yeux, quoi on me permet de respirer ? d’exprimer autre chose, d’aller delà de ce qui est écrit ? Un monde s’est ouvert, c’était comme une prise de conscience ; j’ai senti qu’une partie de moi commençait à se poser ; tout est parti de là… on m’a dit que je pouvais prendre mon temps, respirer, Marcello m’a beaucoup aidé et plus on allait dans les répétitions, dans les spectacles, plus je sentais que je pouvais exprimer plus, que le mot était craquant, l’émotion pouvait sortir d’une manière différente, que le récitatif pouvait être autrement ; là j’ai eu un premier déclic et ça m’a ouvert la porte sur les grands rôles du répertoire. Ma première Lucia je l’ai faite à Rouen mais les vraies Lucia et Traviata sont venues après cette rencontre avec Viotti. Quand j’ai ensuite débuté dans « La Traviata » j’ai pu découvrir une profondeur que je n’avais jamais expérimentée.
C’était un manque de confiance en soi ?
Je ne devrais pas le dire mais probablement ; Vous voyez je ne sais toujours pas comment va mon ego (rires) !
Ecoutiez-vous des chanteuses qui vous ont précédées ?
Sutherland, tout le temps, c’est un mythe ! Après on peut dire qu’on ne comprend pas toujours ce qu’elle dit, rarement même, mais il y a tellement autre chose ; une technique tellement insensée, stupenda !
Verdi, le Bel Canto, ce n’est pas la même approche ?
Non, le bel Canto c’est très lourd à chanter, ce n’est pas le monde que Verdi, ça m’a pris du temps ; J’ai fait « Lucia » à Pittsburg, et ensuite au Metropolitan.
Faire le Met ce n’est pas banal non ?
Non, il n’y a pas beaucoup de Française qui ont chanté « Lucia » avant moi. Je crois qu’il y a eu seulement Lili Pons dans les années 50. Peu de critiques français ont en parlé. Nicolas Joël avait fait une coproduction Toulouse-Met et j’ai fait le deuxième cast. Ça été un gros succès, c’était en 2000 ; Au Met tout est fait pour que vous n’ayez qu’à penser qu’à vous. Le niveau est stratosphérique dans tous les domaines ; l’accueil, les répétitions, tous les corps de métiers sont impressionnants, mais on ne se prend pas pour une star pour autant, tout est fait pour que vous puissiez donner le meilleur de vous-même.. Bien sûr ça eu des retombées sur ma carrière. J’ai eu des propositions. J’y suis retournée en 2008.
Et la Somnambule ?
Il faut une maturité psychologique ; je l’ai faite la première fois à Madrid et c’était Richard Bonynge qui dirigeait. John Sutherland, sa femme, est venue à la générale. Quand je l’ai vue dans la loge je suis restée la bouche ouverte, et elle a été absolument adorable ; elle est venue à toutes les représentations. Elle a été bienveillante, très simple, très gentille, mais la façon dont je l’ai chantée à cette époque et en 2014 au Liceo à Barcelone, c’est le jour et la nuit. L’air d’entrée, vocalise, contre mi, ensuite plonger dans les graves, il faut une tessiture bien ronde, sinon ce n’est pas intéressant, ce n’est pas facile mais c’est tellement beau !
Vous avez chanté dans les arènes de Vérone, cela ne doit pas être évident ?
C’est infernal, c’est dangereux ; lorsque l’on m’a proposé de faire « Le Barbier de Séville » de Rosini dans ces arènes, je me suis dit comment ça va se passer car c’est quand même un opéra intimiste ; mais bon j’avais envie de le chanter d’une part, en italien et en Italie d’autre part et le chanter dans la tonalité écrite, ce qui est rarement fait par les sopranos, je n’ai pas pu résister. C’était un spectacle très dansé, très chanté ; autour de nous on bougeait beaucoup sur scène ; c’est un très beau souvenir aussi.
Maintenant la question qui fâche !
J’ai un Joker tout prêt (rires)
Bon vous êtes reconnue internationalement et à Paris on a compris, on ne vous offre pas souvent des rôles, on vous ignore presque ; et là vous venez d’accepter un rôle secondaire l’Infante dans « Le Cid » de Massenet ! Pourquoi ?
Je vous ferais remarquer que j’ai fait remettre l’air de l’Infante ; il a été écrit pour l’Opéra par Massenet, il avait aussi écrit un trio entre Chimène, Rodrigue et l’Infante ; il y a déjà un déséquilibre avec Chimène dans la pièce de Corneille, c’est un choix du metteur en scène ; j’ai demandé qu’on rajoute cet air, non pas par caprice, mais l’Infante après le meurtre a quelque part un espoir que Rodrigue lui revienne, au niveau dramaturgique cela manquait de ne pas chanter cet air, il rétablit un peu l’équilibre. Tout le monde a accepté.
Luca Lombardo lui aussi a un tout petit rôle, alors que vous avez fait avec lui un superbe Contes d’Hoffman ?
C’est une voix magnifique, il a assumé toutes les répétitions en cas de problème pour Alagna. Le plateau est formidable et il y a une grande entente entre tous les chanteurs.
Face à votre carrière c’est un petit retour à Paris quand-même ?
Bon je vais vous dire on m’avait proposé Chimène, mais ce n’est absolument pas pour moi, je pourrais le chanter, mais sur la longueur c’est trop lourd, comme c’est Nicolas Joël qui l’a monté et qu’on a travaillé souvent ensemble, je lui ai dit que je pouvais faire l’Infante s’il le voulait et puis ça me faisait plaisir de revenir à l’Opéra de Paris, c’est ma ville quand même, et les gens ne m’avaient pas vue depuis la Juive, j‘étais contente de revenir avec Roberto ; on s’était croisé au Métropolitan, je chantais « Lucia » et lui peut-être « Roméo » ou « Carmen », on n’avait jamais chanté ensemble et puis être dirigée par Michel Plasson ça ne se refuse pas !
Vous avez chanté « Guillaume Tell », un opéra avec des rôles lourds à interpréter
Oui pour tout le monde ; j’ai pris un virage à partir de « Moïse et Pharaon ». Avant je chantais Rossini dans des rôles difficiles mais plus abordables, maintenant j’ose des personnages plus compliqués vocalement.
Vous avez connu de nombreux publics est ce qu’il y en a un qui vous a touché particulièrement?
Celui de Metropolitan, bien sûr ; mais quand vous chantez bien dans un pays latin, comme l’Espagne, l’Italie, il n’y a pas d’égal. Le « Cendrillon » dans une mise en scène complètement folle de Laurent Pelly à Barcelone a été un triomphe.
Parlez-moi de ce récital à l’amphithéâtre de l’Opéra Bastille
Presque toutes les œuvres sont nouvelles pour moi ; mon pianiste Antoine Palloc m’a conseillé des œuvres que je n’imaginais même pas chanter avec des textes magnifiques ; j’ai quand même du Debussy, parce qu’on est en France, Reynaldo Hahn, incontournable, et puis il y a des clins d’œil. Les compositeurs ont écrit ces mélodies après avoir composé leur opéra. Je pense que le public reconnaîtra ces opéras.
Et ensuite ?
Après Bastille je refais ce récital le 5 mai à Strasbourg et j’ai le grand plaisir de retrouver Michel Plasson deux semaines après à Valencia pour « Les Pêcheurs de Perles » en concert.

Bon voyage alors chère Annick !
Pour en savoir plus sur cette exceptionnelle chanteuse http://www.annickmassis.com

 

 

 

 

 

 

 

 

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