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« 23ÈME FESTIVAL EUROPÉEN JEUNES TALENTS » : LE BATEAU IVRE

Cathédrale Sainte-Croix-Des Arméniens,  13 Rue du Perche, 75003 Paris

mercredi 5 juillet 2023, 20h

Charlotte Sohy : Triptyque Champêtre op.21 (1925)

Jean Cras : Quintette (1928)

André Jolivet : Chant de Linois (1944)

Marcel Tournier : Suite op.34, Fête (1928)

Quintette Le Bateau Ivre : Samuel Casale, flûte, Aramis Monroy, violon, Valentin Chiapello, alto, Kévin Bourdat, violoncelle, Jean-Baptiste Haye, harpe

Le Bateau Ivre est un quintette instrumental qui associe la flûte et la harpe au trio à cordes. L’aventure commence en septembre 2015 à Strasbourg. Ils se réunissent autour d’une œuvre qui sera le noyau de leur formation, le quintette de Jean Cras. L’interprétation de cette pièce est saluée par le jury du Concours International Léopold Bellan à Paris, qui lui attribue le 1er prix d’honneur en Avril 2016. Après d’autres prix, en 2018, le quintette est admis à l’unanimité en master de musique de chambre au Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse de Paris dans la classe de Michel Moraguès. En 2019, Le Bateau Ivre intègre le programme de musique de chambre européen ECMA.

Lauréat de la fondation Meyer, le quintette sort son premier disque Marionnettes en octobre 2022 sous le label Initiale du CNSMDP. Le nom du groupe fait référence au poème éponyme écrit par Arthur Rimbaud en 1871. Ce dernier bouleversa le paysage poétique français avec cette œuvre radicale. Les compositions originales pour ce quintette partagent avec ce poème un imaginaire nourri d’exotisme, de rêve, voire d’hallucinations mystiques qui les rattachent au courant impressionniste en général.

« Comme je descendais des Fleuves impassibles,
Je ne me sentis plus guidé par les haleurs :
Des Peaux-Rouges criards les avaient pris pour cibles,
Les ayant cloués nus aux poteaux de couleurs…
 »

A été dit par Kevin Bourdat, le violoncelliste de l’ensemble, en introduction du Triptyque Champêtre op.21 de Charlotte Sohy. Cette compositrice est ressuscitée depuis quelque temps par de nombreux musiciens et en particulier par la cheffe d’orchestre de l’orchestre d’Avignon Debora Waldman (voir sur le site à propos de son livre avec Pauline Sommelet La Symphonie oubliée l’histoire d’une symphonie reconstruite avec l’aide du petit-fils de Sohy François-Henri Labey 12/7/2021). Avec cette introduction c’est tout un pan de la musique française que nous a offert ces magnifiques et jeunes musiciens pendant plus d’une heure. Cette musique qui sent bon le terroir, riche de ses traditions, dans le bon sens du terme – oublions Travail Famille Patrie etc etc …- élégante, vivante, joyeuse, qui a su résister au germanisme ambiant, Richard Wagner en tête, Bruckner et consort et que hier encore des Karajan, Böhm, Jochum pas très clairs pendant la seconde guerre mondiale ont imposé par leurs disques, leurs concerts, tous chez DGG …celle de la Schola Cantorum, de Vincent d’Indy, matinée de Chausson, , Duparc, Debussy, Fauré, Reynaldo Hahn. Combat d’arrière-garde ? Que nenni ! Écoutez encore…

« Et dès lors, je me suis baigné dans le Poème
De la Mer, infusé d’astres, et lactescent,
Dévorant les azurs verts ; où, flottaison blême
Et ravie, un noyé pensif parfois descend … »;

Puis ensuite entendez le Quintette de Jean Cras de 1928 interprété par ces cinq jeunes !! Ce compositeur, officier de marine, avec cet art subtil, sensible, de l’expressionisme, c’est du Bonnard en musique ! Un pari stupide ? Non, ils aiment la belle et bonne musique tout simplement et ils l’ont prouvé hier soir dans cette Cathédrale Arménienne ! La belle France, y est présente avec une magnifique sculpture Saint François en extase de Germain Pilon, et un Saint Denis des frères Marsy, et aussi de la peinture du XIXème avec des œuvres de Degeorge, Franque, Schedder, kitch, beinh pourquoi pas…ça vous gêne… ?

« Je ne puis plus, baigné de vos langueurs, ô lames,
Enlever leur sillage aux porteurs de cotons,
Ni traverser l’orgueil des drapeaux et des flammes,
Ni nager sous les yeux horribles des pontons. »

Du fond de la Cathédrale, la flûte superbe de Samuel Casale – d’où nous vient cette stupide aversion de cet instrument en France ? Les salles se vident pour un concert avec un flûtiste ? –  vint rejoindre ses camarades pour interpréter Chant de Linos d’André Jolivet, ce compositeur aujourd’hui mis à l’écart par les orchestres nationaux mais interprété dans le monde entier !? Encore une exception culturelle française ? Ce chant était une œuvre pour flûte et piano pour un concours qui a été remporté par Jean-Pierre Rampal ! Il le transcrivit pour flûte, violon, alto, violoncelle et harpe la même année (1944). C’est ce que nous avons pu apprécier. Quelle beauté, un bonheur de se baigner dans ce poème…ahahah. C’est avec Marcel Tournier et une suite datant de 1928 que le récital continua.

« Mais, vrai, j’ai trop pleuré ! Les Aubes sont navrantes.
Toute lune est atroce et tout soleil amer :
L’âcre amour m’a gonflé de torpeurs enivrantes.
Ô que ma quille éclate ! Ô que j’aille à la mer !
 »

Il avait dix-sept ans et n’avait jamais vu la mer ! Eux ils sont à peine plus âgés, ils n’ont pas connu les guerres, cet impressionnisme musical qu’ils aiment, qu’ils défendent, n’est plus de mise, l’IRCAM est passé par là, la musique spectrale a donné le la, on se doit d’admirer Wolfgang Rhim, Unsuk Chin… et pour paraphraser Serge Régiani les loups musicaux sont entrés dans Paris ! Mais heureusement grâce à ces cinq jeunes Le Bateau Ivre n’est pas près de couler ! Mille Milliards de Mille Sabords !…Hé c’est un capitaine belge qui a dit ça ! Ah, alors ils ont du talent les Belges ! Allez, on en remet un peu…

« Moi qui tremblais, sentant geindre à cinquante lieues
Le rut des Béhémots et les Maelstroms épais,
Fileur éternel des immobilités bleues,
Je regrette l’Europe aux anciens parapets
 ! »

Va pas bien l’Europe…

pour toutes informations www.jeunes-talents.org

jeudi 6 juillet 20h à la Cathédrale Sainte-Croix-des-Arméniens, Quatuor Mirages dans du Haydn et du Beethoven ainsi qu’ un quatuor d’Amy Crankshaw (1991)

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